Il était une fois, en un très proche royaume. Le roi avait un fils. Un grand garçon, fort, auquel le bleu seyait fort bien. Il avait fallu, à un moment donné, marier ce fils, héritier présomptif, bien qu’il ait semblé, un instant, qu’il se destina plutôt aux ordres, s’étant lui-même affublé du surnom de « frère ».
Or donc, on maria le prince, avec une femme… de tête, bien que ce qui était dessous reste tout à fait digne d’intérêt. Il s’avéra que cette femme, devenue princesse, avait, par son labeur, son activité débordante, pris dans le royaume une place bien supérieure à celle de son époux. Pourtant elle lui gardait respect et affection, malgré ses absences.
Un jour qu’un félon s’était, une fois encore, élevé contre le roi, la princesse, qui parlait au nom du roi bien souvent, était partie à la guerre, suivie du prince, qui fut mené un peu plus tard, par la garde de son épouse, jusqu’au lieu des combats. Les deux couronnés, comme à leur habitude, s’en allaient, le jour, batailler, et la nuit… Dormir. Parfois, entre les deux, un banquet venait agrémenter la soirée. La princesse d’ailleurs, duchesse en un pays de vin, était fort bien achalandée en breuvages divers.
Il se trouve qu’un fameux soir, une de ces ripailles dégénéra. En effet, le vin servi ce jour là n’était pas que de raisin, et une substance maline mit les invités sur le flanc, au point que l’on craignit pour leur vie.
Alerte fut donnée, évidemment, et la jeune princesse, affolée, ordonna que l’on s’occupe du prince avant tout, avant même de la soigner, elle. Inquiète pour sa sécurité, elle fit disposer sa garde autour de la tente, ne laissant entrer que les médecins et quelques rares proches. Le prince fut soigné, par la garde de sa femme d’abord, par d’autre ensuite. Il resta près de 6 semaines au fond de la tente, veillé par sa femme.
Puis un beau matin, il s’envola, tel le merle enfin capable de battre des ailes. Il partit, avec une jeune femme.
Le temps passa, la guerre s’acheva, et chacun rentra chez soi.
Mais le vieux roi, lassé de tourner en rond en son palais, décida d’aller visiter le bon peuple. Aussi, il entreprit une tournée en ses terres, entouré de sa cour, les fidèles, ceux qui travaillaient pour lui, et bien sur la longue colonne des flatteurs, pique-assiettes et ribaudes officielles, colonne renforcée par les aigris, ceux qui ne supportaient pas le pouvoir de sa bru.
Il se donnait force banquets en ces temps là, et la noblesse des contrées visitées, ravie, se gavait aux frais de la couronne, récupérant au mieux l’impôt versé. Mais un soir…
Un soir presque comme les autres, un drame éclata parmi les ors de la salle. Le prince, fou, saoul ou possédé par le malin, fit un esclandre devant son père. Le pauvre jeune homme, armé comme en bataille, s’en vint accuser la princesse d’avoir voulu l’occire, et d’avoir fait passer sa blessure pour empoisonnement ! Stupeur dans la salle, stupeur de ceux qui étaient là pendant cette guerre, stupeur de ceux qui ne savent jamais rien, seules quelques éminences grises, sans doute, se réjouissaient de voir aboutir leur lent travail de sape.
On attendit alors la réponse du roi. Se laisserait il aveugler par l’amour paternel, ou écouterait-il la voix de la raison ?